SUR LES TRACES DU COMMANDO TERRORISTE
24 heures après l’attaque sanglante
de Grand-Bassam, les propriétaires des hôtels pris pour cibles font des
révélations.
L’explosion
est sourde et tonitruante. On peut l’entendre à un kilomètre à la ronde.
Au-dessus de la plage qui longe l’Etoile du sud, Warf hôtel et Les paillotes,
un essaim de charognards affolés, survole le sable en tournoyant. Les personnes
qui se trouvent au Warf ce matin, sont figées, l’oreille tendue. « C’est
quoi ce bruit ? », s’enquiert quelqu’un, prêt à prendre ses jambes à
son cou. Un militaire présent sur les lieux sourit, dresse bien son béret sur
la tête et lance en sortant : « c’est l’unité de déminage ».
Depuis le matin, cette branche intrépide des forces de l’ordre a quadrillé la
plage. Un cordon de sécurité a été mis en place devant l’hôtel Etoile du sud,
où personne ne peut entrer. De même, aucun civil ne doit avoir accès à la berge.
Le motif ? Des grenades ainsi que des explosifs y sont encore enfouies. Il
faut les désamorcer. Une fois la peur causée par l’explosion passée, le gérant
du Warf soupire. Il ne veut plus revivre le traumatisme de ce dimanche noir où
les terroristes ont ouvert le feu sur des innocents venus juste s’amuser à la
plage. Même si le bilan partiel fait état de 18 décès, dont 15 civils et trois
éléments des forces de l’ordre, selon Ouattara Alassane, le directeur général
de Warf hôtel, ça aurait pu être pis.
Des personnes sauvées par le
personnel de Warf hôtel
Les
terroristes, a l’entendre, ont commencé à tirer sur la foule depuis Koral
Beach, un petit hôtel chic situé au bord de la mer, juste avant l’Etoile du
sud. « Alors, tous ceux qui se trouvaient à la plage ont couru vers Warf
hôtel, parce que c’était la seule issue de secours. La foule était immense. Il
y avait beaucoup d’enfants », se souvient le gérant de l’hôtel qui se
nomme également Ouattara. Quand ils sont entrés dans la cour de l’hôtel, M.
Ouattara affirme que le personnel de l’établissement
les a aussitôt aidés à prendre les escaliers et à s’enfermer dans les chambres
situées au premier étage. « Il y avait tellement de personnes qu’on a été
obligé de les mettre 30 par chambre », confirme le gérant. Alors qu’ils
logent les fuyards dans la débandade, les terroristes qui viennent de Koral
Beach, avancent en vidant leurs canons. Mais ces derniers se rendent compte qu’il
n’y a presque plus personne sur la plage. Les gens se sauvent. « Deux
d’entre eux ont pris un groupe de personnes en chasse jusqu’au Warf hôtel. Nous
les avons aidés à se cacher. Lorsque les terroristes sont entrés dans la cour, ils
n’ont pas compris tout de suite, parce qu’il n’y avait presque personne dehors.
Les gens s’étaient refugiés dans les chambres », poursuit M. Ouattara. Il
faut quelque temps aux assaillants pour comprendre ce qui se passe. A ce moment,
le personnel de l’hôtel, coincé dans les chambres, s’inquiète. Vont-ils oser
défoncer les portes ? Tous savent que ce serait alors un carnage. Les
personnes sont tellement entassées dans les chambres que « certains
étaient même couchés sous les lits », selon notre interlocuteur. Pendant
que certains croisent les doigts derrière les murs de l’hôtel et que d’autres prient
intérieurement, le commando d’assassin avance. Ils sont si lourdement armés,
d’après le personnel de Waf hôtel, que chacun a un fusil de secours fourré au
dos. Et quand ils pénètrent dans la cour, quelques personnes cherchent encore à
se cacher. M. Ouattara est parmi eux. C’est là qu’il aperçoit l’un de ses employés.
« Je lui ai crié de courir se cacher. Il a enjambé les marches deux à deux,
mais s’est couché devant une porte, parce qu’elle était fermée. Quand il a levé
la tête pour voir si les terroristes approchaient, une balle a frappé l’une des
balustres de la balustrade, juste à côté de sa tête. Je lui ai crié de garder
la tête baissée », raconte M. Ouattara en nous désignant l’impact de
balle. Il réussira, lui, à regagner une chambre et s’y enferme.
Le carnage aux Paillotes
A
l’entendre, c’est la structure de Warf hôtel, grand avec de nombreux bâtiments
annexes qui a découragé les terroristes. Ils auraient perdu trop de temps à
tenter de débusquer les personnes cachées.
Alors, les monstres poursuivent leurs chemins vers l’endroit où ils
feront une véritable boucherie: Les Paillotes. Le charmant lieu de repos se
trouve à une centaine de mètres de Warf hôtel. Facile d’accès et relativement
exposé à cause de ses bungalows à portée dès qu’on pénètre dans la cour. Il y
aura six morts. Selon Mme Colin Rokia, l’épouse du propriétaire des Paillotes,
c’était la dernière cible potentielle. Quand les tireurs arrivent aux Paillote,
il y a deux évidences qui apparaissent à leurs yeux. D’abord, ce petit hôtel
est le dernier sur leur chemin. Ensuite, les bandits, d’après Ouedraogo
Youssouf (un client du lieu), se rendent compte qu’ils n’ont pas fait assez de
dégâts jusque-là. Alors, ils lancent tout dans le massacre aux Paillotes. Les
terroristes font ici ce qu’ils avaient évité de faire sur les autres lieux pour
éviter de perdre du temps. « Certains étaient montés sur le toit et
tiraient, se rappelle Colin Rokia. Il y a un qui a défoncé la porte des
chambres et a tiré sur un Français, alors que ce dernier se trouvait dans sa
douche. Le pauvre est mort sur le champs ». La directrice de l’Institut
Goeth est également à l’intérieur des bâtiments et ne tarde pas à se retrouver
nez à nez avec l’un des assaillants. La fripouille ouvre le feu et ne lui
laisse aucune chance. « Il y avait un employé de l’ONU sur qui ils ont
tiré. L’homme est décédé », frémit Mme Colin. Dans la cour de l’hôtel, des
collègues de l’officier en question sont venus prendre ses affaires. Mme Colin ajoute
qu’un autre homme, de peau noire, a reçu une balle et en est mort. Avant de se
souvenir, en nous montrant une photographie affreuse : « une dame
blanche a eu la mâchoire presque arrachée par une balle. Elle a été conduite à
l’hôpital». La violence des combats des Paillotes a une autre explication.
C’est là que les forces de sécurité ivoirienne ont stoppé leur avancée. Les
échanges de tirs, selon des témoins, étaient dignes d’un film de guerre.
« Il y a eu un véritable affrontement entre les forces de sécurité et les
terroristes », s’étend la dame, qui précise par la même occasion qu’un
militaire a été touché pendant les affrontements. Les murs de l’hôtel sont
criblés de balle, les piliers des paillotes érigés dans la cour, portent des
impacts de plombs. Devant la plage qui longe le lieu, des grenades ont été
abandonnées. Tandis que l’unité de déminage continue de se promener, la plage à
la recherche d’explosifs, on observe la mer, on écoute le vagissement des vagues.
Si des corps y sont encore ? Ouédraogo Youssouf n’en est pas sûr. « Mais
il y a un fait dont il faut tenir compte. Pendant que les terroristes tiraient à
tout va sur la foule, beaucoup de ceux qui se trouvaient dans l’eau n’ont eu
pour seule issue que de continuer à avancer au milieu de la mer. Certains ne
savaient pas nager et se sont peut-être noyés », émet-il comme hypothèse.
Une hypothèse qui n’a pas encore été confirmée. Car, d’après les gérants de
Warf hôtel et les personnels des Paillotes, la police n’a pas encore retrouvé
de corps rejetés par la mer. Mais les recherches continuent. Même si pour Colin
Rokia, la priorité est ailleurs. « Le tourisme est mort ici avec ce qui
vient de se passer, regrette la jeune dame. Pour rassurer les populations, il
faut sécuriser les plages les week-ends. Ici, on continue de travailler mais,
c’est sûr que les gens ont peur et les clients ne reviendront pas s’il n’y a
pas de sécurité ». M. Ouattara, gérant du Warf hôtel a été obligé de vider
les chambres d’hôtel après l’incident. Tous les clients sont partis. Certes,
l’endroit est toujours ouvert, mais la psychose est fortement présente.
Il faut sécuriser les plages
« On
n’a pas besoin de dizaines de forces de l’ordre. Il faut juste poster quelques
policiers aux différentes extrémités pour rassurer les gens »,
propose-t-il. La sécurité ? A Koral Beach, on pense que le problème n’est
pas là non plus. Mme Touré, la gérante est très dépitée ce lundi quand elle
entend parler de la fusillade. « Ici, deux personnes ont reçu des
balles : un homme et une dame. On les a conduits à l’hôpital. Mais la dame
a succombé à ses blessures à l’hôpital général de Grand-Bassam », déplore notre
interlocutrice. C’est la prise en charge sanitaire des victimes de cette
attaque terroriste qui a failli, selon Mme Touré. Cependant, à l’hôpital
général de Grand-Bassam, la directrice générale, Tan Nathalie, relativise.
« Nous avons reçu trois blessés hier. Deux étaient en très mauvais état
quand ils sont arrivés ici. Malheureusement, ils ont succombé à leurs blessures
peu après », se désole la directrice générale, tout en refusant de
divulguer l’identité de ces personnes. Mais le dernier blessé, au dire de Mme
Tan, reçoit des soins et serait hors de danger. Grand-Bassam est-elle, elle
aussi, hors de danger ? La présence musclée des forces de l’ordre dans la
ville rassure. Mais pour les populations, les terroristes ont fait ce qu’ils
avaient à faire. Pas sûr qu’une autre attaque aura lieu dans l’ancienne
capitale ivoirienne.
Raphaël
Tanoh
Leg :
Depuis lundi, l’unité de déminage a quadrillé les environs de l’hôtel Etoile du
Sud.
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