#MOSSIKRO#: LA DEMOLITION A COMMENCE
On dirait un champ de
bataille. Les trous dans les murs évoquent des impacts d’obus. Les débris de
briques mélangés au sable rouge sont rependus partout, comme de la poussière
qui retombe après un raid aérien. Mais Mossikro n’a été ni bombardé, ni même attaqué.
Ce spectacle de désolation offert hier est simplement le fait de personnes
dotées de bon sens. Depuis les éboulements de 2014 qui ont causé une douzaine
de morts dans ce bled, Danho Paulin, le maire d’Attécoubé, a
décidé d’abandonner la sensibilisation et de passer au plan B. En d’autres
termes, casser toutes les maisons mal situées. L’opération, débutée avec les
agents de la mairie, a pris une autre tournure depuis la semaine dernière.
Cela, à cause des récents éboulements survenus à la mi-juin. «Nous avons décidé
de nous associer aux agents de la mairie pour démolir les maisons construites
dans des zones à risques, parce que cela ne fait pas honneur au quartier»,
explique Koné Saidou, qui participe à cette opération. Ce qui est rare, car en
général les habitants sont opposés à ce type d’actions. Hier, ils étaient
mobilisés pour attendre l’équipe de «démolisseurs» de la mairie, qui devait
débarquer avec les outils infernaux: marteaux, massues, etc. Mais ces
derniers ont décidé de reporter la séance d’abattage des murs à mercredi
prochain. «Nous avons tenu une réunion dimanche pour cela, explique le chef du
village de Mossikro Santé 3, Coulibaly Salifou. Près de 300 personnes y ont
participé. Aujourd’hui, nous sommes tous unanimes : il faut aider la
mairie à détruire les maisons. Car leur présence nuit à notre réputation». Coulibaly Salifou ne participe pas à la
démolition, cette tâche étant destinée au plus vigoureux comme ce gaillard de
Koné Saidou. Quand Saidou parle de fracasser un mur avec sa massue, on voit immédiatement
dans ses yeux une étincelle s’allumer. Pour les baraques situées à moins de dix
mètres des flancs de la colline, les «démolisseurs» se contentent de les
perforer avec leurs marteaux. Ce sont des murs fragiles. Il suffit d’avoir les
biceps un tantinet saillis pour en venir à bout. Toutefois, pour les maisons
situées à moins de cinq mètres des flancs de la colline qui borde Mossikro et
qui tue à chaque fois qu’elle s’effrite, il faut entièrement les casser. La
tâche des «démolisseurs» ne s’achève pas là, cependant. Le plus dur pour eux reste
le suivi. Coulibaly
Salif, le conseiller chargé de l'environnement du maire Danho Paulin, le sait. «A chaque fois qu’on casse
une maison, il faut faire en sorte que la population ne vienne pas se
réinstaller. Les habitants de Mossikro l’ont compris. C’est pour cela qu’ils
ont décidé de nous accompagner», nous explique-t-il au téléphone. Agacé
d’attendre parler de sa commune dans les médias avec des qualificatifs
macabres, Coulibaly Salif signale que le maire n’est plus prêt à lever le pied.
Ils iront au bout, selon le conseiller de Danho Paulin. Le comité de suivi que
les habitants de Mossikro ont mis en place pour les aider est dans leur propre intérêt.
«Ils ont compris que s’ils ne font pas cela, nous allons raser toutes les
maisons de ce quartier, qu’elles soient mal situées ou pas», fait-il savoir. La
chefferie a bien assimilé le message. Et Coulibaly Salifou, le chef de Mossikro
Santé 3 rêve même à des espaces sécurisés qu’ils pourront aménager au sein du
quartier pour y loger des personnes déguerpies. Mais quand on lui demande s’il
peut y avoir encore des endroits sécurisés pour construire à Mossikro, il répond :
«les couloirs».
Raphaël Tanoh
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