''Enfants Microbes'': UN PHENOMENE EN VOIE D'EXTINCTION?





Ils régnaient en maîtres et faisaient la loi depuis plusieurs années à Abobo. Mais depuis des mois, les ‘‘enfants microbes’’ semblent avoir pris du recul. Réalité ou simple illusion ? Enquête.

A la gare d’Abobo, la dernière attaque à l’arme blanche et en bande organisée remonte à 5 mois. L’une des plus longues trêves, depuis que ces funestes bandes de voyous connues sous le nom d’ ‘‘enfants microbes’’ sèment la terreur dans la commune du maire Toungara. Ils avaient l’habitude de frapper ici, presque toutes les semaines, puis vers le Lycée moderne d’Abobo. Et quand l’envie leur prenait, ces bandits bifurquaient à droite pour se retrouver à Samaké. Là, quelques passants étaient brutalisés avant d’être écumés des pieds à la tête. Si le butin n’était pas suffisant, les gbaka (ndlr, véhicules de transport en commun) étaient pris pour cible. Les chauffeurs et leurs passagers donnaient tout ce qu’ils avaient sur eux. Pendant les veilles de fêtes, qu’elles soient païennes ou religieuses, il valait mieux ne pas sortir avec un objet de valeur sur soit. Si possible, ne pas sortir du tout. Mais depuis mi-août, les populations de Samaké et d’Abobo-centre semblent avoir retrouvé une quiétude. Le 23 décembre dernier, alors qu’on s’attendait à voir réapparaître ces délinquants, rien. Le  lendemain, pareil. Puis, on s’est dit qu’ils attendaient sûrement pour frapper le 30 ou le 31 du même mois. Là encore, les habitants d’Abobo-centre n’en revenaient pas : aucune fripouille à l’horizon. Est-ce la fin d’un long feuilleton d’horreur qui a débuté au lendemain de la crise postélectorale et dont les protagonistes n’ont été jusque-là que les Abobolais ? Ce mercredi, en dépit du vent sec et violent de l’harmattan, nous essayons de trouver des réponses dans le fourmillement d’Abobo-gare et ses environs. Les premières victimes ici, ce sont les chauffeurs de wôrô-wôrô (ndlr, véhicules de transport en commun) et les vendeurs qui sont continuellement présents sur les lieux. Très souvent, on a vu des gaillards de 80 kilos prendre la poudre d’escampette devant cette bande de gamins. « Je n’ai jamais eu honte de fuir, parce qu’il s’agit de ma vie », tempête ce matin un chauffeur qui fait la ligne Abobo-Angré. Si les ‘‘enfants microbes’’ sont partis ? Non, évidement, fait-il savoir. Ce serait une grave erreur de le croire. « Une fois, raconte un autre chauffeur de wôrô-wôrô qui habite Abobo-centre, la police est venue nous voir et a demandé qu’on dénonce les personnes qui sont responsables de ces attaques. Mais comment voulez-vous qu’on le fasse alors qu’elles sont là et qu’elles nous observent? » Tous les jours, dit-il, ces gens voient ces mauvais garçons rôder. « Ce sont des personnes qui commettent ces attaques. Si elles sont toujours là, cela signifie que le phénomène n’est pas fini. Ces voyous peuvent surgir d’un moment à l’autre », ajoute l’homme. Son collègue à côté de lui habite le sous-quartier ‘‘Cinécool’’. « Je peux vous donner le nom du chef de gang qui sévit là-bas : Solo Bièta. Il a à peine 25 ans. Tous le monde le voit, tout le monde sait ce qu’il fait, mais personne n’en parle par peur de représailles », ajoute ce dernier. C’est d’ailleurs pour la même raison que nos interlocuteurs préfèrent rester dans l’anonymat. Mais qui est Solo Bièta ? Pour le connaître, nous nous sommes rendus à ‘‘Cinécool’’, juste à quelques encablures. Après des échanges discrets avec des habitants taciturnes et plutôt méfiants, un constat ressort : soit personne ne le connaît ici, ou aucun résident n’a envie de parler de lui. Solo Bièta semble ne pas exister. Dans notre démarche, nous rencontrons un certain Ouédraogo Yahaya, la vingtaine. Sur son poignet droit : une couche de sparadrap. Yahaya, un commerçant, raconte qu’il a été agressé le 27 décembre dernier, à Abobo ‘‘derrière rail’’. Aucun doute possible, fait-il remarquer : les andouilles qui lui ont tranché le poignet étaient des ‘‘enfants microbes’’. Son téléphone portable et des billets de banque sont partis avec eux. Ils étaient une demi-dizaine, à l’entendre, munis de machettes.  En interrogeant d’autres habitants du quartier qui travaillent à Abobo-gare, nous comprenons alors que le phénomène s’est simplement déporté.  Le lendemain, jeudi, nous osons traverser les rails. Mais les indications sont vagues. Des habitants désignent le secteur entre les rails et le quartier ‘‘Marley’’  quand d’autres montrent le sous-quartier ‘‘Sagbé’’. Il y aurait eu plusieurs cas d’agressions dans ces endroits. Des agressions perpétrées par les ‘‘enfants microbes’’, depuis le mois de septembre. D’après les témoignages, les attaques continuent. Mais nous n’avons rencontré sur les lieux, aucune victime. Au commissariat du 14ème arrondissement d’Abobo, on se veut accueillant. Cependant, personne ne veut aborder la question. Il faut une autorisation « de la hiérarchie ». Une hiérarchie que nous avons jointe. Au ministère de l’Intérieur et de la sécurité, une source avance que ce tableau n’est guère surprenant. Depuis l’opération « Brise apaisante » en août dernier, selon elle, plusieurs de ces voyous sont entrés dans leurs coquilles.  Et ce n’est que le début. Une chose que l’ex-ministre de l’Intérieur et de la sécurité, Hamed Bakayoko, partage.

Raphaël Tanoh


Encadré :

Hamed Bakayoko : « Ne les appelez plus microbes »

Mercredi, le ministre de l’Intérieur et de la sécurité dans le gouvernement démissionnaire, Hamed Bakayoko, a eu des échanges avec les députés au sujet du projet de loi portant programmation des forces de sécurité intérieure pour les année-2016-2020. Hamed Bakayoko s’est voulu rassurant : « Aujourd’hui, je peux vous dire que les Ivoiriens peuvent dormir tranquille. C’est vrai que ça et là il peut y avoir encore des difficultés, mais la sécurité se consolide.» Et Hamed Bakayoko de préciser : « A partir d’aujourd’hui, n’appelez plus ces délinquants, ‘‘microbes’’, parce que cela n’est pas bien. Ensuite, c’est galvaudé (…) Aujourd’hui, dès qu’il y a une situation on l’attribue à ces délinquants. Souvent, ce n’est pas le cas ».  Avec l'Autorité pour le désarmement, la démobilisation et la réintégration (Addr), d’après lui, il existe des centres de resocialisation pour tous ces jeunes qui ont été victimes de la crise. « Pour vous dire que le phénomène se réduit.»

R.T.

Leg : Le phénomène des ‘‘enfants microbes’’ se réduit selon Hamed Bakayoko.

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