Dr Cissé Losseni (commissaire du hadj): "IL NE FAUT PAS FAIRE PLEURER LE PELERIN"
Désigné
jeudi dernier, le nouveau commissaire du hadj, Dr (en médecine) Cissé Losséni,
a accepté d’accorder sa toute première interview à Nord-Sud Quotidien. Il donne
plus de détails sur les changements intervenus cette année, et rassure les
candidats au voyage.
L’organisation
du hadj est devenue très délicate en Côte d’Ivoire avec des couacs à
répétition. N’avez-vous pas eu quelques
appréhensions en acceptant le poste de commissaire ?
Je ne suis ni enthousiaste ni peiné par
cette nomination. Il s’agit de la communauté. Chacun de nous, qu’il soit guide
religieux ou fidèle doit pouvoir apporter à cette communauté ce qu’il a de
meilleur. Comme le disait le cheick Boikary Fofana, ce qui est important dans
le hadj, c’est mettre la préoccupation du pèlerin en avant. Son bien-être. Car
le pèlerin est l’hôte de Dieu. Si cet hôte est content de vous, cela équivaut à
une bénédiction que Dieu ne laissera jamais tomber. Mais si vous faites pleurer
cet hôte de Dieu, c’est une malédiction. Dans un verset du Coran Dieu dit que celui qui joue avec le pèlerin
aura affaire à lui. Je mesure le poids de ma responsabilité, mais je sais que
c’est Dieu qui m’a nommé. Et c’est lui seul qui pourra m’aider. Je vais donner
ce que je peux. Je ferrai en sorte que l’équipe qui est avec moi travaille de
façon collégiale, concertée, sans hypocrisie. Tant que nous serons dans la
sincérité, Dieu nous aidera.
Le
lancement du hadj est arrivé un peu tard. La commission médicale avait même
souhaité que les consultations commencent dès le début de l’année. Le temps perdu ne constitue-t-il pas un
handicap ?
C’est vrai, nous sommes dans le même schéma
que l’année dernière. Nous n’avons pas
commencé tôt, mais avec le temps dont nous disposons, nous ferrons tout pour
respecter les délais. L’année dernière, en 45 jours, nous avons fait la
consultation des pèlerins. Cette année, en deux mois, nous allons le faire. C'est-à-dire
du 25 juin au 25 août.
La commission
médicale à demandé plus de rigueur pendant les consultations afin que des
personnes inaptes ne soient plus autorisées à participer au voyage. Va-t-on
recaler ces grands malades qui meurent pendant le pèlerinage ?
Vous savez, vous pouvez aller au pèlerinage
bien portant et mourir là-bas. Tout comme vous pouvez aller malade et revenir
sain. La consultation médicale est faite pour prévenir, détecter les anomalies.
Les pèlerins qui sont bien portant auront immédiatement leur certificat
d’aptitude. Ceux qui sont porteurs de tares seront référés à des spécialistes
qui vont les requinquer. Ensuite, ils reviendront avec l’avis de ces médecins
afin d’avoir leurs certificats d’aptitude. Il y a donc certains qui méritent un traitement avant de partir. D’autres,
par contre, ne peuvent même pas partir. Parce qu’ils représentent un danger
pour eux ou pour les autres. Par exemple, s’ils sont atteints de tuberculose,
ils peuvent contaminer d’autres personnes. C’est pour cela que nous disons que
tous les candidats au hadj, quelque soit leur catégorie sociale, doivent être
examinés. Celui qui a une incontinence urinaire et qui dort dans la même
chambre que d’autres pèlerins, il constitue une gêne pour lui et les autres.
Faut-il
s’attendre à une limite d’âge?
L’âge n’est pas un facteur éliminatoire. Il
y a des personnes de 90 ans qui font des
efforts physiques que des jeunes qu’eux ne peuvent faire. Le seul critère
d’élimination, c’est l’état de santé.
Pendant
la cérémonie de lancement, le ministre de l’Intérieur a annoncé que 2.000
pèlerins parmi les 7.000 prévus cette année, seront octroyés à des
organisateurs privés. N’est-ce pas un retour à l’anarchie qui a bloqué des
milliers de pèlerins à Abidjan en 2006 ?
Nous sommes dans un Etat laïc. L’Etat n’a
pas pour vocation d’organiser le Hadj. Il appartient à la communauté musulmane
d’organiser ses cultes. Cela dit, dans le hadj, il y a un volet sécuritaire, un
volet social et un volet diplomatique. C’est l’honneur du pays qui est en jeu.
C’est pour cela qu’après l’échec de 2006 bis, l’Etat a pris les choses en main.
Et il ne vient pas remplacer la communauté, il vient plutôt l’aider. On ne peut
pas faire une rétrocession sauvage. C’est pour cela que l’Etat a décidé de
donner un tiers des 7.000 pèlerins aux organisations privées et s’occupera du
reste. Mais il y a des règles. Il y a un cahier de charges qui est élaboré et
qu’il faut respecter.
Quels
sont les critères de sélection de ces organisations privées ?
Ceux qui sont intéressés doivent se rendre au
ministère de l’Intérieur, plus précisément à la direction des cultes pour
retirer les documents. Les critères y sont. Puis, il faut faire des démarches
pour avoir l’agrément du ministère. Ensuite, il faut se rendre en Arabie Saoudite
pour contacter le consulat qui vous indique chez le Moassassat (institution
saoudienne chargée du pèlerinage) pour remplir
les formalités. C'est-à-dire chercher des maisons, avoir le contrat
d’hébergement, celui du Moassassat. Après cela, vous avez votre carte
d’organisateur. C’est avec cette carte d’organisateur que l’Etat vous donne un
quota de pèlerins selon le contrat que vous avez signé en Arabie Saoudite. Si
vous avez prévu des logements pour cent personnes en terre Sainte, l’Etat vous
donnera cent pèlerins. Mais vous êtes soumis à un contrôle. Le consulat va
visiter vos bâtiments pour être sûr qu’ils sont adéquats.
Les
intéressés ont jusqu’à quand pour postuler?
Les démarches commencent dès maintenant. La
date limite sera fixée par l’Arabie Saoudite.
Ces structures auraient-elles une liberté totale ou
travailleront-elle sous la supervision de l’Etat ?
L’Etat ne se désengagera pas. Comme je l’ai
dit, ces structures seront soumises à un contrôle. Maintenant, l’Etat a fixé le
coût du hadj à 1,5 million de Fcfa. Si un pèlerin veut s’offrir un hadj Vip, le
privé lui dira ses conditions. Ce qui est sûr, au préalable, l’Etat se donne
les moyens de s’assurer que les conditions sont remplies pour ces organisations.
Les
organisateurs privés vont-ils percevoir l’argent du pèlerin ?
Pour ce qui concerne l’Etat, les 1,5
million sont payés au trésor. Des directions du trésor sont indiquées sur les
prospectus. Quant aux privés, c’est avec eux que les pèlerins payent le coût du
hadj. Même moi, en tant que commissaire du hadj, je ne pourrai pas me mêler de
cela. Je ne m’occupe que des 5.000 pèlerins de l’Etat. Cela dit, l’Etat, à
travers le consulat ou d’autres personnes, supervisera leur organisation.
Les
procédures de délivrance des visas et autres documents de transport seront-elle
les mêmes pour les type d’organisation ?
Oui. Avec leurs documents, les
candidats qui iront vers des organisateurs privés vont introduire leur demande de visa à travers
la direction des cultes qui est l’organe régulateur.
Des
associations veulent que leurs pèlerins bénéficient des mêmes avantages que les
pèlerins de l’Etat. Elles sont prêtes à demander à ces pèlerins à verser leur
argent au trésor.
Ce n’est pas possible.
Le
transport aérien a été confié à Air Côte d’Ivoire. N’est-ce pas une responsabilité
trop lourde pour une compagnie naissante ?
Le ministre (de l’Intérieur) a précisé
qu’il appartient à Air Côte d’Ivoire de prendre toutes les dispositions, en
créant des partenariats avec une ou d’autres compagnies de transport pour
éviter l’échec de l’année dernière. Air Côte d’Ivoire a un partenaire saoudien
cette année. Cette compagnie dispose d’une bonne flotte. Je pense que ça
devrait être un partenariat assez fort. Air
Côte d’Ivoire peut aussi être prudente en ne se limitant pas à un seul partenariat.
Je souhaite même qu’elle agisse dans ce sens pour éviter d’avoir des imprévus. Mais
cette décision appartient seulement à Air Côte d’Ivoire.
Les
inscriptions tardives perturbent parfois l’organisation. Ne craignez vous pas
que cela se reproduise cette année ?
Plus tôt les pèlerins viendront faire leur
consultation médicale mieux ça ira. Ils
auront environ trois à quatre semaines avant le mois de ramadan pour venir se
faire consulter. Et pendant le ramadan, il y a des précautions à prendre pour ceux
qui doivent venir faire leurs consultations. Ils peuvent jeûner avant de venir,
mais ils ne doivent pas manger leurs le « souri » (nourriture de 4 h
du matin). Ils doivent manger à 20h, 21h au plus tard. Mais pas à 4h. Sinon, pendant
le prélèvement de sang, on risque de trouver chez certains un taux de sucre
élevé et croire qu’ils sont diabétique alors que ce n’est pas le cas. Dans ces
conditions, ils seront obligés de revenir un autre jour. Et cela perd du temps.
J’ai aussi un message important à faire passer. La prise de sang n’est pas un
facteur qui annule le jeûne. Ils ne doivent donc pas être réticents. Nous
serons mêmes content si les 7.000 pèlerins finissent leurs consultations avant
le mois de ramadan. L’année dernière, il n’y a pas eu de décalage après la date
butoir. Il n’y aura pas de décalage cette année. Si nous atteignons le quota
avant la date, nous allons arrêter. Et
les consultations commencent le 25 juin pour finir le 25 août.
Interview
réalisée par Cissé Sindou et Raphaël Tanoh
Leg: Dr Cissé Losséni : « je
souhaite que Air Côte d’Ivoire prévienne
les imprévus.»
Intertitre : « Le pèlerin qui a
une tuberculose est un danger… »
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