‘’Enfants microbes’’ : LA PSYCHOSE GRANDIT!!!
Alors qu’on approche de l’élection
présidentielle, le phénomène des ‘’enfants microbes’’ continue de terroriser
les Abidjanais. Pourquoi ? Comment l’éradiquer ? Dossier.
C’est
le témoignage d’un ami qui veut aller voir la famille à Abobo. L’oncle qu’il
appelle lui demande de laisser chez lui les objets de valeurs avant de venir ;
et surtout, d’avoir un œil de faucon. « Si tu aperçois des gens en train
de fuir, cours mon petit et ne te retourne pas !» Là où certains
discuteront des cadeaux à apporter pour la famille, ces deux-la parlent de
consignes de sécurité. Et c’est parfois une question de vie ou de mort. Non,
Abobo n’est pas en guerre. Les armes se sont tuent depuis la fin de la crise
postélectorale. Ce dont on parle aujourd’hui, c’est d’une nouvelle forme de banditisme qui était jusque-là
inconnue des annales de la police et de la justice ivoirienne. Des gosses, des
jeunes, dont l’âge varie entre 8 et 25 ans, sèment la terreur, armés de
machettes et de couteaux. Leur mobile ? Le vol. Leur cible ?
N’importe qui se trouve sur leur chemin. Les commerçants, les passants, les
gérants de cabines et même les passagers des véhicules de transport en commun
en ont payé le prix fort. Ceux qui leur résistent sont littéralement taillés en
pièce. Tout comme cela a été le cas pour le jeune Abdoulaye Derra, élève en
classe de seconde C au Lycée moderne d’Abobo, tailladé à mort dans la nuit du
dimanche 27 à lundi 28 novembre 2013. Le corps sans vie du lycéen va être transféré
à la morgue de l’hôpital Félix Houphouet-Boigny d’Abobo. Tantôt dénommé ‘’gang
à la machette’’, ces assassins n’ont pas d’état d’âme.
Force de l’ordre et homme religieux
tailladés
Impossibles
à raisonner parce que sous l’effet de la drogue au moment de leurs forfaits,
ils agressent quiconque leur tombe sous la main, fût-il homme de Dieu. L’imam
de la mosquée de Marley (un sous-quartier d’Abobo), ne tardera pas à
l’apprendre à ses dépends. Dans la nuit du 1er mai 2014 à 23 h,
Sangaré Yacouba est attaqué près du commissariat du 14ème
arrondissement d’Abobo par une bande de gamins. Rués de coups de
couteaux et de machettes, le guide religieux sera laissé pour mort par ses agresseurs, avant d’être évacué à l’hôpital. La police ? Ils s’en moquent encore plus. Considérés par Me Flan Raymond, greffier près du
tribunal de 1ère instance de Yopougon comme des « parasites nuisibles à la
santé, remarquables par leur petitesse et leur virulence », ces
‘‘microbes’’ vont d’ailleurs le démonter en tailladant un caporal des Forces
républicaine de Côte d’Ivoire (Frci), dans la nuit du
lundi 15 au mardi 16 septembre 2014. Frappé au dos et à la nuque, au quartier
Anonkoua 3 d’Abobo, le militaire sera dépouillé de ses deux téléphones-portables, d’une somme
de 30.000 FCfa ainsi que de sa moto de marque « Apsonic », de type 17. Ne leur parlez surtout pas de moral ! Le
30 janvier 2015, autour de 2 h du matin, alors que nous sommes en pleine
veillée funèbre, des voyous font irruption sur les lieux. Ils attaquent à la
machette parents et amis venus pleurer leur mort. Les scélérats dont l’âge
varie entre 9 et 15 ans, emportent argent, bijoux, sac à main. Ce dernier
forfait inquiète particulièrement les populations de la commune. Et pour cause.
Depuis début décembre 2014, les actions de la police et des habitants d’Abobo
avaient permis de faire reculer le phénomène un tantinet. Plusieurs chefs de ‘’microbes’’
ayant été condamnés dont Doumbia Sidiki, 19 ans, qui écopera de 10 ans fermes
le 2 décembre 2014. Un verdict du tribunal d’Abidjan-Plateau. Cerise sur le
gâteau : mi-avril 2015, montré comme étant le principal caïd de cette
bande à Abobo, Touré Almamy est lynché et tué par la foule en furie. Alors
qu’on pensait enfin trouver la paix avec la mort du « parrain », le
phénomène des ‘’microbes’’ va au contraire exploser, contaminant les autres
communes de la capitale économique. Yopougon-Siporex, le 12 décembre 2014, un homme
d’environ 40 ans est tailladé à la tête. A Attécoubé,
Adjamé, Koumassi, on découvre qui sont ces impitoyables « gangs à la
machette ». Aujourd’hui, autorités policières comme population sont face à
la réalité : on n’a pas affaire à un serpent, mais plutôt une hydre. Il
n’y a donc pas de tête à couper. De
plus, le monstre ne cesse de changer son modus operandi.
Un monstre à plusieurs têtes
A
Abobo où tout a commencé, les enfants sont désormais sur la touche. Ce sont les
adultes qui font le boulot. Sans vergogne, ils n’hésitent pas à attaquer en
plein jour. Ces fripouilles frappent et disparaissent tel l’éclair dans les
ruelles inextricables de Kennedy (un sous-quartier de la commune), leur tanière.
A l’approche du Ramadan, le rond-point d’Abobo et ses environs ont été écumés
de font en comble. L’équipe de Nord-Sud Quotidien est tombé sur l’une de ses
attaques fulgurantes. Un groupe de 7
personnes, des jeûnes âgés de 18 à 22 ans, a suffit à semer la panique au sein de la gare de wôrô-wôrô
(véhicule de transport en commun) et du marché située derrière la mairie. « Tout le monde ici a fui lorsqu’on les a
aperçus », nous a témoigné ce jour-là, un chauffeur de gbaka, Bakalé
Lama, à 72 heures du ramadan. Aïssata Bamba, une
jeune élève de 17 ans, est
étourdie par une énorme paire de gifle alors qu’elle téléphone. Le jeune « requin »
aux dents jaunes et au regard rougi par la drogue qui se tient en face d’elle
lui demande son téléphone portable sur un ton spartiate. Alors qu’ils
embarquaient, les passagers des gbaka
(ndlr, véhicules de transport en commun) sont contraints de vider leurs poches dare-dare, sous la
menace d’une lame acérée de machette. La débandade était indescriptible. Après le
départ du « groupe de la terreur », les populations témoigneront que
ce n’est pas la première fois. Ils leur avaient déjà fait ce coup-là, en pleine
journée. Et la nuit de Maoulid, ces bandits ont même osé sortir de leur tanière
pour ratisser un peu, histoire de se faire de l’argent de poche. Et depuis,
chaque fois qu’une fête approche, il faut s’attendre à revoir leurs têtes à
claque. Désespérés, certains chauffeurs de gbaka affirment avoir acheté des
machettes pour se défendre. Mais en
réalité, ils prennent toujours la poudre d’escampette dès que la bande de
drogués surgit au coin de la rue.
Les parents refusent de
collaborer
Ce qui a fait dire à un officier du 14ème arrondissement d’Abobo, situé à quelques encablures, que la
population ne collabore pas. « Nous avons
sensibilisé, organisé des rencontres avec les parents. Nous leurs avons dit de
nous signaler tous les cas suspects, parce que ce sont leurs propres enfants
qui commettent ces actes. Hélas, nous n’avons reçu ni plainte ni
signalement », explique-t-il. Le problème avec ces agressions, pour
l’officier, c’est qu’elles se passent très vite. Le temps qu’ils arrivent sur
les lieux, les bandits disparaissent dans les ruelles insalubres et dédaléennes
des quartiers. Quand bien même ils parviennent souvent à intervenir à temps,
c’est assez difficile de leur mettre le grappin dessus. « On ne peut pas
tirer sur une personne qui tient un couteau, même si elle vient de commettre un
meurtre. Juridiquement, cela ne se fait pas », avance-t-il. Avec ces explications, on comprend combien est
difficile pour la police de lutter contre le phénomène. Après un temps
d’accalmie, la mort, mercredi dernier, de Claude Larissa Abogny,
une étudiante de 23 ans, poignardée à Yopougon-Niangon, remet la question sur
la table. Comment en venir à bout de cette gangrène? Yao Kouamé, le préfet de
police d’Abidjan s’est rendu, vendredi, dans la commune, après le décès de la
jeune fille et l’agression de deux jeunes présentés comme des ‘‘microbes’’ et
les auteurs des faits. L’un des messages forts du commissaire-divisionnaire a
été de demander aux populations de ne pas se rendre justice. Mais plutôt, de
coopérer avec les forces de l’ordre. Une coopération pour le moment problématique:
les parents refusent de livrer leurs gosses et les voisins feignent de ne
rien voir par peur de recevoir des représailles!
Raphaël Tanoh
Leg :
Le phénomène des ‘‘enfants microbes’’ prend de l’ampleur.
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