Débordements, bassesses, etc. : Les Ivoiriens sont-ils malades ?
L’affaire
Yves de M’Bella a fait couler beaucoup d’encre et de salive. La condamnation de
l’animateur à 12 mois de prison avec sursis pour apologie du viol, n’aura été
qu’anecdotique, en fin de compte, devant le problème de société que cet épisode
soulève. Ce n’est pas la première du genre. Hélas, ce ne sera pas la dernière. « À
la télévision et à la radio, aujourd’hui, il y a du laisser-aller. Le même
animateur qui a été condamné avait déjà demandé à une Miss de la sous-région, en
direct sur une radio, la couleur de ses dessous. Cela n’avait jamais ému
personne à l’époque. Il y a eu des faits pires que cela. Et, pour l’apologie du
viol, il a fallu un soulèvement pour que la Haute autorité de la communication
et de l’audiovisuel (Haca), se saisisse de l’affaire. Dans la presse écrite, la
Haca travaille, il faut le reconnaître. Mais au niveau de l’audiovisuel, il y a
un laisser-aller. Il faut resserrer les boulons », explique Marius Comoé, président
du Conseil national des organisations de Consommateurs de Côte d'Ivoire (Cnoc-CI).
Mourante
Selon
Inana Gaspard, sociologue à l’Ecole normale supérieure (ENS), tout cela découle
de la perte progressive des valeurs en Côte d’Ivoire. Et c’est pour lui un
signale d’alerte pour les Ivoiriens. Aujourd’hui, un homme est accusé de vol
sur les réseaux sociaux, quelques instants plus tard, c’est une star nationale
auprès duquel des personnalités veulent associer leur image ; une personne
publique est mourante sur son lit d’hôpital, on a aucun scrupule à poster son
image sur le Web pour en rire.
« La
situation s’empire », note-t-il. Avec l’avènement des nouvelles
technologies de l’information et de la communication (NTIC, pour lui, le
phénomène s’est accentué. Les Ivoiriens copient, dit-il, et exportent, en
fonction de ce qu’ils voient à la télévision, sur les réseaux sociaux.
« C’est un problème de société qui n’arrange personne (…) Il faut que dans
chaque groupe social en Côte d’Ivoire, on prenne conscience que nos valeurs
disparaissent », interpelle-t-il.
D’après Dr Kamarako Vasséko de l’Université Félix
Houphouët-Boigny, ce que nous voyons comme déviation est souvent le reflet de
la société. Les gens « interagissent », selon lui. Ils agissent en
fonction de la réponse de l’autorité. Que ce soit la censure, la répression ou
l’inaction.
Mais, à
l’entendre, il ne faut pas nécessairement lier les évènements. De nombreuses
dérives observées en Côte d’Ivoire entrent dans un contexte politique. « Le champ politique est très complexe.
On cherche à trouver l’erreur chez l’autre et à l’exposer pour l’affaiblir. Le
champ politique est violent. La morale du champ politique est différente de la
morale au sein de la famille. On ne fait pas de cadeau à son adversaire (…) Ce n’est pas de tout le monde dont on rit de la
souffrance ou dont on se moque de la mort (…) Et, malheureusement, en Côte
d’Ivoire, on a tendance à tout ramener sur le champ politique. C’est ce qu’il
faut changer », explique-t-il. Que doit-on
faire ?
La solution, pour Dr
Serge Lida c’est de revenir aux fondamentaux, cela, dès l’école. « Revenir
à un mode de socialisation qui tiennent compte à la fois du basique et de
l’endogène, avec bien sûr les critères que veulent les institutions
internationales », note-t-il. Au niveau des réseaux sociaux, au dire du Dr
Karamako Vasseko, l’autorité doit avoir le contrôle sur ce qui s’y passe. Pour
ce qui est de la télévision et de la radio, Marius Comoé appelle la Haca à
faire son travail. Si ces trois éléments sont maitrisés nul, doute selon les
experts, que la société ivoirienne se relèvera.
Raphaël Tanoh
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