« LES SYNDICATS NE SONT PAS DES PARTIS D'OPPOSITION », Prof. N’Guessan Kouamé, secrétaire national de la Cnec
Dans
cette interview explosive, le secrétaire national de la Cnec tire à boulet
rouge sur la Deco, les présidents d’universités et un responsable de
commission.
La
concertation nationale sur l’enseignement supérieur s’est tenue du 17 au 19
juin dernier, à Abidjan. Une concertation à laquelle vous avez pris part. aAvez-vous
été satisfaits des résolutions ?
Nous tenons d’abord à dire merci au
ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche scientifique, le Dr
Albert MabriToikeusse, qui nous avait promis cette rencontre et qui a tenu
parole. L’autre élément sur lequel nous voulons attirer l’attention de tous,
c’est qu’il y a eu 5 commissions, pendant les débats.Mais nous n’avons pas été
associés à la commission sur la gouvernance universitaire, dirigée par Prof.
Gourin Germain, par ailleurs directeur de l’Enseignement supérieur. Il n’était
pas question de venir une nouvelle fois statuer sur la gouvernance lors de
cette concertation. Parce que c’est un point sur lequel nous avions déjà
tranché en mai 2018 à Yamoussoukro, lors d’un séminaire. Les résolutions de ce
séminaire stipulaient noir sur blanc que pour être président d’une institution
universitaire, il faut faire un appel à candidature. Un point qui a été validé
en commission comme en plénière. Malheureusement, pendant la concertation
nationale du 17 au 19 juin, on est revenu sur ce point, et nous avons été
sciemment exclus des échanges. Même là, il a été décidé en commission que pour
désigner le président d’une institution universitaire il faut un appel à candidature,
tout comme à Yamoussoukro. Mais ce qui est grave, c’est qu’en plénière, le
président de la commission a pris sur lui de manière unilatérale de falsifier
le document afin de proposer des nominations à la tête de nos universités, en
lieu et place de l’appel à candidature.
Vous
avez vu ces faits ?
Oui, puisque plusieurs enseignants
présents s’en sont même pris à lui après cette décision assez grave.
A-t-il
le droit de changer les conclusions d’une commission, de manière
unilatérale ?
Absolument pas. C’est pour cela que
c’est scandaleux. Nous dénonçons cela et attirons l’attention du ministre de
l’enseignement supérieur sur ces faits.
Quel
serait le but d’une telle manœuvre selon vous ?
Après nos investigations, il s’est avéré
que la plupart des responsables de commission cherchent à être nommés en tant
que président d’université. Les textes sont clairs : Là où il y a nomination,
ce sont les postes de doyens d’universités ainsi que les chefs de départements.
Concernant la présidence, c’est un appel à candidaturepure et simple qui a été
validé.
Croyez-vous
que les nominations à la tête de nos universités soient sources de problèmes ?
Cela s’est vu à travers les différentes
crises survenues ces dernières années à l’université et dans les grandes écoles
publiques. Tandis que l’appel à candidature fait appel à des critères de
gouvernance bien précis, la nomination tient plus compte des appartenances
politiques. On place souvent des gens qui n’ont aucune compétence managériale à
la tête d’institutions sérieuses. Cela ne peut conduire qu’à une seule chose :
les problèmes. Certaines personnes ont été désignées président d’institution
sans avoir été même chef de classe.
Y
a-t-il eu d’autres points important abordés lors de cette rencontre ?
Au niveau du statut de l’enseignement du
supérieur, nous nous sommes accordés sur la revalorisation de l’indemnités de
logement. La question du salaire lié au système LMD a également été abordée. A
ce sujet, il faut dire que la prime d’encadrement et la prime académique, font
partie de ce salaire et que nous exigeons leur revalorisation.
Lors
des échanges, les autorités ont donc donné leur accord de principe quand à ces
différents points abordés, notamment l’indemnité de logement ?
Ces points ont été validés pendant la
concertation nationale. Tous les syndicats peuvent désormais les porter,
légitimement. L’avantage est donc que désormais les syndicats de l’enseignement
supérieur peuvent se mettre ensemble pour porter ces doléances.
Une
sorte d’intersyndicale alors ?
Exact. Dans les jours à venir, nous allons
entrer dans la phase active, pour la création de cette intersyndicale afin de
mieux défendre nos points. La bataille à
venir sera donc de porter ces points devant la tutelle, s’asseoir et savoir ce
que nous voulons exactement. Mais avant tout, nous attendons que le Premier
ministre valide les résolutions de la concertation nationale.
Pendant
que cette rencontre s’achevait, une affaire a également fait couler beaucoup
d’encre et de salive. Plusieurs enseignants du supérieur ont été exclus de la
présidence du jury du baccalauréat. A juste titre ?
C’est depuis l’annéescolaire 2017-2018
que cette affaire a commencé. Nos responsablesd’universités et de grandes
écoles se sont mis à jouer à ce petit jeu. En 2017-2018 déjà, le directeur
général de l’Ecole normale supérieur (ENS) avait rayé de sa liste du jury au
bac, certains enseignants membre de la Cnec, sans motif valable. Cette année,
c’est le président de l’université Péléforo Gbon Coulibaly de Korhogo et celui
de l’université Félix Houphouet-Boigny de Cocody qui font parler d’eux. Ils ont
exclu des listes des présidents du jury au bac, de nombreux enseignants.
Selon
la présidence de l’université de Cocody, ces enseignants sont sous le coups de
sanctions disciplinaires.
C’est un règlement de compte. Les
enseignants exclus sont pour la plupart membres du bureau locale ou national.
A
Korhogo, d’après les informations reçues, la présidence avance la thèse d’une
erreur. Elle aurait oublié de mettre certains noms d’enseignants sur la liste...
Difficile à croire. Là aussi les
enseignants rayés sont du bureau local ou national de la Cnec. Ils savent que les
enseignants vont au jury du bac pour rendre service, mais aussi avoir un peu
d’argent. En tant que syndicats, nous prenons des dispositions pour éviter que
ce genre de chose prospère. Et c’est l’une des raisons pour lesquellesnous
demandons l’appel à candidaturepour diriger nos universités.
Certains
enseignants accusent la Direction des examens et concours (Deco) de cautionner
cela…
C’est juste. La Deco s’est rendue complice
de cette comédie. Ce que nous dénonçons
d’ailleurs. Mais il y a plus grave. La direction de la Deco procède à
l’affectation des présidents de jury sans tenir compte des critères exigés, qui
sont l’ancienneté, la formation, le grade. J’ai été affecté par exemple à
Adjouffou dans un quartier presqu’enclavé. Certains qui n’ont même pas reçu de
formation pour être Juré sont mieux logés. C’est pour cela que j’ai décidé
ceci : tant que le sous-directeur actuelle de la Deco sera là, je ne
participerais pas à la présidence du jury du bac. Je ne serai donc pas là cette
année à mon poste de président du Jury. Et nous demandons que Deco reviennent à
l’enseignement supérieur. Parce que ce qui se passe en ce moment est grave.
L’une
des choses qui vous a été reprochée, c’est la manière de faire le syndicalisme.
Aujourd’hui, on voit bien que vous insistez sur la formation syndicale…
Non seulement nous mettons l’accent sur
la formation, mais ce que nous faisons aujourd’hui, c’est d’améliorer l’image
de la Cnec aussi bien sur la plan national qu’international. Ce qui explique
les nombreux voyages que nous effectuons en ce moment. Nous étions à Bruxelles
récemment, pour une conférence, puis à Paris avec la Fédération mondiale des
travailleurs scientifiques dont je fais partie du bureau exécutif. Nous venons
également de Genève où nous avons participé à la conférence internationale du
travail. Nous étions aussi à Montréal avec la plus grande centrale syndicale du
Québec. Tout cela va nous permettre d’orienter la Cnec au niveau de la
formation.Et de mieux revendiquer.
En
vous confrontant à ces différents pays, pensez-vous qu’ailleurs la manière de
revendiquer soit différente de celle qu’on voit en Côte d’Ivoire ?
Ailleurs, on manifeste de manière
pacifique. Je dirais même que dans la sous-région, les gens sont en avance sur
nous, sur ce plan. Tout simplement parce que leurs précédents chefs d’Etat, le
plus souvent, ont eu une grande ouverture.
N’est-ce
pas le cas ici ?
Ici, les syndicatssont plutôt considérés
comme des partis d’opposition.
Et
pourquoi cela ?
Parce qu’on regarde toujours qui est à
la tête du syndicat avant de le recevoir. Au lieu de se concentrer sur les
revendications, on cherche à déterminer les origines de celui qui dirige la
structure. Ensuite, on politise la chose. En se mettant dans cette disposition,
naturellement, on en vient à refuser la discussion ; on attend qu’il ait
grève pour engager les négociations. Ce sont des choses qui doivent cesser. Et
vite.
Raphaël Tanoh
Leg : Prof. N’Guessan Kouamé
affirme qu’il ne rejoindra pas son poste de président de jury cette année.
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