" LES GENIES SONT DANS NOS FLEUVES" : Vincent Kouassi (anthropologue)









(entretien réalisé en 2018)

 On assiste depuis quelques semaines à une série d’inondations dues à des crues de fleuves. Il y a eu Aboisso, Agboville et maintenant la région de la Marahoué.   Qu’est-ce qui explique cette situation ?
Plusieurs facteurs peuvent expliquer ces crues. Il y a le changement climatique, provoqué par les pratiques des populations. Vous avez dans ces zones-là, les gens qui coupent le bois. Quand le déboisement atteint un certain niveau, vous assistez à ce genre de phénomène. A côté de cela, il y a certains endroits où les populations enlèvent le sable au bord de l’eau. Alors c’est normal qu’elle déborde.  Mais à côté de cela, vous avez des facteurs socio-anthropologiques, liés à la culture, la désacralisation, l’abandon des pratiques religieuses, le non-respect des pratiques magico religieuses ; les conflits intrafamiliaux, intergroupes entrainant la colère des esprits de l’eau malédiction ; le non-respect des alliances avec l’eau ; la crise des valeurs et du lien social, etc.

Tout cela n’est pas rationnel…

Nous sommes en Afrique et ce sont des facteurs dont il faut tenir compte. Si dans une ville ou un village, les gens ont fait une alliance avec l’eau, et que cette alliance a échoué, vous pouvez assister à ce genre de cru que nous avons vu. C’est pour cela lorsque vous allez dans une région, n’oubliez pas de faire la libation, de demander pardon aux génie.


Les fleuves ne sont pas dans les mêmes régions. Les causes sont-elles les mêmes pour toutes les régions ?
En dehors des facteurs humains que je viens de vous citer, qui sont entre autres, le déboisement chaque peuple, chaque société, a son identité, à ses traditions, ses habitus. Dans un village du sud-est de la Côte d’Ivoire où je suis déjà allé, par exemple, tout étranger qui vient doit se baigner dans leur fleuve, parce qu’ils adorent l’eau. Vous ne trouverez pas ces coutumes ailleurs.

Les Ivoiriens n’ont pas l’habitude d’observer ce phénomène en Côte d’Ivoire. Qu’est-ce qui fait la particularité de ces crues ici ?  
Ce phénomène arrive ailleurs, s’il faut l’expliquer de manière rationnelle, le point commun à ces crues, c’est le changement climatique, lié à nos habitudes. Notre particularité ici en Côte d’Ivoire, c’est qu’en plus de cela, il faut tenir compte des facteurs sociologiques je j’ai cités ci-haut.

Est-ce possible de prévenir cela ?
Oui. D’un côté, l’Etat doit renforcer la résilience des populations riveraines face au changement climatique. Je pense qu’il faut également mener dans ces zones une étude d’impact environnemental et sociale (Eies), et éventuellement déplacer les populations s’il le faut. D’un autre côté, il faut respecter les valeurs socio-culturelles.

Ce phénomène risque-t-il de se reproduire ?
Hélas, oui, si nous continuons à nuire à notre environnement ; si l’Etat ne s’attaque pas tout de suite aux causes de ces crues. Et si la population tourne le dos aux traditions.

Entretien réalisé par Raphaël Tanoh
Leg : Dr Kouassi demande de s’attaquer tout de suite aux causes du phénomène.

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