"50 ENTREPRISES DE RAMASSAGE D'ORDURES SONT MENACEES", Dr Youssouf Soumahoro, président de l’Association des sociétés de collecte d’ordures.
Depuis
l’annonce de plusieurs mesures par le
gouvernement dans le cadre de la salubrité urbaine, les structures nationales
de ramassage d’ordures s’inquiètent.
Malgré
les efforts pour le ramassage des ordures,
Abidjan demeure sale. Le gouvernement a
décidé de passer à la vitesse supérieure depuis le début de l’année en prenant
plusieurs mesures. Avez-vous été approchées en tant que structures de ramassage
d’ordures ?
Depuis l’arrivée de la ministre de la
Salubrité urbaine, de l’environnement et du développement durable en février
2015, nous lui avons indiqué les différents problèmes dans la filière ; ce
qu’il fallait pour que véritablement la question des déchets ménagers soit résolue
en Côte d’Ivoire. Nous avons résumé cela en trois points. D’abord, le problème
de financement de la filière qui empêche les opérateurs d’être efficaces,
ensuite le problème des infrastructures qui fait que la collecte est difficile
sur le district d’Abidjan. Enfin, il y a les contrats des opérateurs qui
doivent être prolongés. Voilà les problèmes qu’il fallait résoudre afin de permettre
au secteur de mieux se porter.
Quelle
a été la réponse du gouvernement ?
La ministre a pris l’engagement d’honorer
tout cela. Quelques mois après, elle a annoncé un appel d’offres international
pour la gestion des déchets ménagers. Un appel d’offres dont les critères ne
permettent pas aux opérateurs nationaux d’être éligibles. C’est cet appel
d’offres qui suit son cours. Dans le plan du gouvernement, il y a un schéma
pour stratifier Abidjan en trois zones. Aujourd’hui, nous attendons de savoir
quelle place le gouvernement a réservé dans ce schéma aux opérateurs nationaux.
N’est-ce
pas parce que vous ne disposez pas d’équipements conséquents pour le ramassage
des ordures ménagères que le gouvernement se tourne vers des opérateurs
internationaux ?
Nous avions proposé d’organiser les
opérateurs locaux en trois grands groupements d’intérêt économique (GIE) qui
couvriraient ces trois zones d’Abidjan. Nous sommes entrés en contact avec les
banques qui ont d’ailleurs accepté de nous accompagner au renouvellement de nos
parcs autos. Nous sommes aujourd’hui une cinquantaine d’entreprises qui vivent
plus ou moins de cette activité.
Le
gouvernement affirme qu’il veut travailler avec les plus sérieuses…
Pour l’instant, l’Etat a sa politique de
gestion. Nous ne pouvons pas faire de bras de fer. Nous faisons simplement des
propositions. Dans notre schéma de trois grands groupements d’intérêt
économique, les plus petites structures étaient censées être avalées par les
plus grandes, avec en appui l’accompagnement de la banque pour le
renouvellement du parc auto, et l’organisation des pré-collecteurs en PME. Nous
sommes d’accord que certains collecteurs d’ordures ont parfois des difficultés.
Mais il ne faut pas les changer pour autant. Il faut au contraire chercher à les
renforcer. Dans l’appel d’offres il n’y a que quatre groupes internationaux en
compétitions. Jusqu’à présent on ne nous a pas donné de place. Que deviendront ces
50 entreprises de ramassage d’ordures? Nous l’ignorons pour l’instant. La
ministre nous a expliqué que l’opérateur qui serait choisi au terme de l’appel
d’offres devrait pouvoir travailler en partenariat avec les structures locales.
Mais est-il vraiment obligé de le faire ? Rien dans le document de l’appel
d’offres ne le stipule clairement. Il faut comprendre que ce sont 20 entreprises
au niveau d’Abidjan qui ont un contrat avec l’Etat. Les autres sont à l’intérieur du pays.
En
attendant, vous continuez de collecter les ordures…
Oui, c’est ce que nous faisons. Et c’est
pour cela que nous disons que l’Etat nous est redevable. Nous avons fait d’énormes
sacrifices pour le pays. Aujourd’hui, ce sont 12 milliards de FCfa que l’Etat
nous doit. Le métier que nous faisons est extrêmement difficile. Les gens ont
tendance à confondre le secteur de la salubrité et celui des Travaux publics.
La salubrité demande beaucoup de moyens financiers. C’est toujours qu’il faut faire sortir de
l’argent.
Vous
auriez aimé que l’Etat confie sa nouvelle politique de gestion des ordures
ménagères aux structures nationales ?
Au Ghana c’est un groupe national qui
gère les ordures ménagères. Aujourd’hui le Ghana est un modèle en termes de
propreté. Mais cela a été d’abord une volonté politique d’accompagner le
secteur. Pourquoi ? Parce que le gouvernement a fait confiance aux
opérateurs nationaux. Ce grand groupe ghanéen a réussi à créer de l’emploi et a
même fondé une école de formation en gestion d’ordures ménagères. La
question des ordures en Côte d’Ivoire concerne en premier lieu les Ivoiriens
eux-mêmes. Que ce soit une structure américaine, européenne ou asiatique, il
faut comprendre que personne ne viendra ici pour faire de la philanthropie.
Tant qu’il y aura un problème de financement, il y aura un blocage. Nous, nous
avons surmonté à maintes reprises ces problèmes, par pur sacrifice. Il y a de
la compétence ici, nous avons des ingénieurs qualifiés. Lorsque nous sommes
allés au Maroc récemment pour une rencontre, la Côte d’Ivoire a été désignée
première en terme de schéma de présentation de collecte d’ordures. Cela
signifie que nous avons des idées. Les banques sont prêtes à nous accompagner,
pourvu que l’Etat accepte de nous accorder des contrats conséquents. Je le dis
encore, le problème de salubrité peut se résoudre au niveau national.
L’Etat
peut-il vraiment vous faire confiance quand on connaît toutes vos difficultés?
Oui, il faut que le gouvernement ait
confiance en ses opérateurs nationaux. Nous n’avons jamais accepté de faire de
grève. L’Etat doit participer à notre encadrement. Ensuite, réglons le problème
des infrastructures, puis, la question de financement et enfin prolongeons les
contrats des opérateurs nationaux. Nous remercions déjà l’Agence nationale de
salubrité urbaine (Anasur), qui vient de lancer des contrats à l’intérieur. Désormais
ces contrats avec les opérateurs passent à 3 ans dans quelques villes de
l’intérieur. Ce qui montre que certaines de nos doléances sont en train d’être
prises en compte. Nous sommes capables d’assainir le pays. En son temps, nous avons
même proposé au gouvernement de nous aider à créer le groupement d’intérêt
économique et de nous tester sur trois
ans. A l’arrivée du président français, François Hollande, nous l’avons
vu : il n’y avait plus d’ordures dans les rues. Tout simplement parce que
la directrice générale de l’Anasur a mis les moyens à notre disposition. En
48h, nous avons assaini Abidjan. En 2009, lorsque la Banque mondiale a apporté
son appui à la Côte d’Ivoire, on cherchait les ordures dans les rues. Il n’y en
avait pas.
La
fermeture de la décharge d’Akouédo est pour cette année. Comment entrevoyez-vous
l’après Akouédo ?
Sur ce point il faut comprendre qu’aucun
opérateur étranger ne voudra aller bousiller ses camions sur la route d’Akouédo.
Ce que nous avons fait, nous. Mais je crois que cette fois-ci sera la bonne,
nous le sentons : la décharge sera fermée. En même temps, il faut des
centres d’enfouissement technique.
Interview réalisée par Raphaël Tanoh
Leg : Youssouf Soumahoro demande au
gouvernement de compter sur eux.
:
« 50
entreprises de ramassage d’ordures sont menacées »
Depuis
l’annonce de plusieurs mesures par le
gouvernement dans le cadre de la salubrité urbaine, les structures nationales
de ramassage d’ordures s’inquiètent.
Malgré
les efforts pour le ramassage des ordures,
Abidjan demeure sale. Le gouvernement a
décidé de passer à la vitesse supérieure depuis le début de l’année en prenant
plusieurs mesures. Avez-vous été approchées en tant que structures de ramassage
d’ordures ?
Depuis l’arrivée de la ministre de la
Salubrité urbaine, de l’environnement et du développement durable en février
2015, nous lui avons indiqué les différents problèmes dans la filière ; ce
qu’il fallait pour que véritablement la question des déchets ménagers soit résolue
en Côte d’Ivoire. Nous avons résumé cela en trois points. D’abord, le problème
de financement de la filière qui empêche les opérateurs d’être efficaces,
ensuite le problème des infrastructures qui fait que la collecte est difficile
sur le district d’Abidjan. Enfin, il y a les contrats des opérateurs qui
doivent être prolongés. Voilà les problèmes qu’il fallait résoudre afin de permettre
au secteur de mieux se porter.
Quelle
a été la réponse du gouvernement ?
La ministre a pris l’engagement d’honorer
tout cela. Quelques mois après, elle a annoncé un appel d’offres international
pour la gestion des déchets ménagers. Un appel d’offres dont les critères ne
permettent pas aux opérateurs nationaux d’être éligibles. C’est cet appel
d’offres qui suit son cours. Dans le plan du gouvernement, il y a un schéma
pour stratifier Abidjan en trois zones. Aujourd’hui, nous attendons de savoir
quelle place le gouvernement a réservé dans ce schéma aux opérateurs nationaux.
N’est-ce
pas parce que vous ne disposez pas d’équipements conséquents pour le ramassage
des ordures ménagères que le gouvernement se tourne vers des opérateurs
internationaux ?
Nous avions proposé d’organiser les
opérateurs locaux en trois grands groupements d’intérêt économique (GIE) qui
couvriraient ces trois zones d’Abidjan. Nous sommes entrés en contact avec les
banques qui ont d’ailleurs accepté de nous accompagner au renouvellement de nos
parcs autos. Nous sommes aujourd’hui une cinquantaine d’entreprises qui vivent
plus ou moins de cette activité.
Le
gouvernement affirme qu’il veut travailler avec les plus sérieuses…
Pour l’instant, l’Etat a sa politique de
gestion. Nous ne pouvons pas faire de bras de fer. Nous faisons simplement des
propositions. Dans notre schéma de trois grands groupements d’intérêt
économique, les plus petites structures étaient censées être avalées par les
plus grandes, avec en appui l’accompagnement de la banque pour le
renouvellement du parc auto, et l’organisation des pré-collecteurs en PME. Nous
sommes d’accord que certains collecteurs d’ordures ont parfois des difficultés.
Mais il ne faut pas les changer pour autant. Il faut au contraire chercher à les
renforcer. Dans l’appel d’offres il n’y a que quatre groupes internationaux en
compétitions. Jusqu’à présent on ne nous a pas donné de place. Que deviendront ces
50 entreprises de ramassage d’ordures? Nous l’ignorons pour l’instant. La
ministre nous a expliqué que l’opérateur qui serait choisi au terme de l’appel
d’offres devrait pouvoir travailler en partenariat avec les structures locales.
Mais est-il vraiment obligé de le faire ? Rien dans le document de l’appel
d’offres ne le stipule clairement. Il faut comprendre que ce sont 20 entreprises
au niveau d’Abidjan qui ont un contrat avec l’Etat. Les autres sont à l’intérieur du pays.
En
attendant, vous continuez de collecter les ordures…
Oui, c’est ce que nous faisons. Et c’est
pour cela que nous disons que l’Etat nous est redevable. Nous avons fait d’énormes
sacrifices pour le pays. Aujourd’hui, ce sont 12 milliards de FCfa que l’Etat
nous doit. Le métier que nous faisons est extrêmement difficile. Les gens ont
tendance à confondre le secteur de la salubrité et celui des Travaux publics.
La salubrité demande beaucoup de moyens financiers. C’est toujours qu’il faut faire sortir de
l’argent.
Vous
auriez aimé que l’Etat confie sa nouvelle politique de gestion des ordures
ménagères aux structures nationales ?
Au Ghana c’est un groupe national qui
gère les ordures ménagères. Aujourd’hui le Ghana est un modèle en termes de
propreté. Mais cela a été d’abord une volonté politique d’accompagner le
secteur. Pourquoi ? Parce que le gouvernement a fait confiance aux
opérateurs nationaux. Ce grand groupe ghanéen a réussi à créer de l’emploi et a
même fondé une école de formation en gestion d’ordures ménagères. La
question des ordures en Côte d’Ivoire concerne en premier lieu les Ivoiriens
eux-mêmes. Que ce soit une structure américaine, européenne ou asiatique, il
faut comprendre que personne ne viendra ici pour faire de la philanthropie.
Tant qu’il y aura un problème de financement, il y aura un blocage. Nous, nous
avons surmonté à maintes reprises ces problèmes, par pur sacrifice. Il y a de
la compétence ici, nous avons des ingénieurs qualifiés. Lorsque nous sommes
allés au Maroc récemment pour une rencontre, la Côte d’Ivoire a été désignée
première en terme de schéma de présentation de collecte d’ordures. Cela
signifie que nous avons des idées. Les banques sont prêtes à nous accompagner,
pourvu que l’Etat accepte de nous accorder des contrats conséquents. Je le dis
encore, le problème de salubrité peut se résoudre au niveau national.
L’Etat
peut-il vraiment vous faire confiance quand on connaît toutes vos difficultés?
Oui, il faut que le gouvernement ait
confiance en ses opérateurs nationaux. Nous n’avons jamais accepté de faire de
grève. L’Etat doit participer à notre encadrement. Ensuite, réglons le problème
des infrastructures, puis, la question de financement et enfin prolongeons les
contrats des opérateurs nationaux. Nous remercions déjà l’Agence nationale de
salubrité urbaine (Anasur), qui vient de lancer des contrats à l’intérieur. Désormais
ces contrats avec les opérateurs passent à 3 ans dans quelques villes de
l’intérieur. Ce qui montre que certaines de nos doléances sont en train d’être
prises en compte. Nous sommes capables d’assainir le pays. En son temps, nous avons
même proposé au gouvernement de nous aider à créer le groupement d’intérêt
économique et de nous tester sur trois
ans. A l’arrivée du président français, François Hollande, nous l’avons
vu : il n’y avait plus d’ordures dans les rues. Tout simplement parce que
la directrice générale de l’Anasur a mis les moyens à notre disposition. En
48h, nous avons assaini Abidjan. En 2009, lorsque la Banque mondiale a apporté
son appui à la Côte d’Ivoire, on cherchait les ordures dans les rues. Il n’y en
avait pas.
La
fermeture de la décharge d’Akouédo est pour cette année. Comment entrevoyez-vous
l’après Akouédo ?
Sur ce point il faut comprendre qu’aucun
opérateur étranger ne voudra aller bousiller ses camions sur la route d’Akouédo.
Ce que nous avons fait, nous. Mais je crois que cette fois-ci sera la bonne,
nous le sentons : la décharge sera fermée. En même temps, il faut des
centres d’enfouissement technique.
Interview réalisée par Raphaël Tanoh
Leg : Youssouf Soumahoro demande au
gouvernement de compter sur eux.
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