#ABOBO GARE# : "LES #MICROBES# REGNENT EN MAITRES"




Tandis que l’indice de sécurité en Côte d’Ivoire est au même niveau que  New York et Genève (1,18), dans la commune d’Abobo, les populations vivent dans la peur. En cause, le phénomène des « microbes ».

Ce midi, la route qui longe la mairie d’Abobo du côté du centre culturel n’a rien de particulier. On aperçoit les mêmes véhicules de transport en commun stationnés à même la chaussée (wôrô-wôrô) ; souvent éventrés, sans phare ni fenêtre, prêts cependant à charger.  Et ce fourmillement indescriptible de piétons et de vendeurs ambulants criant à qui mieux-mieux leurs marchandises. Pourtant, un fait peu ordinaire vient de frapper cette voie, il y a une demi-heure de cela.  Un groupe de 7 personnes, des jeûnes âgés de 18 à 22 ans, a débarqué en pleine journée pour dépouiller passants, passagers et commerçants. Pendant une dizaine de minutes, ça a été la débandade totale. « Tout le monde ici a fui lorsqu’on les a aperçus », témoigne Bakalé Lama, un chauffeur de gbaka, qui vient à peine de se remettre de cette scène. Aïssata Bamba, une jeune élève de 17 ans, ajoute, bouleversée : « J’étais au téléphone quand, tout à coup, quelqu’un m’a giflée. Le temps de comprendre ce qui se passait, un jeune prenait mon téléphone portable ». Selon l’écolière, en réalisant que c’était cette terrible bande de voyous à la machette qui se fait appeler « microbes », elle a aussitôt pris ses jambes à son cou sans demander son reste. Les faits se sont déroulés autour de 11h. « Ils sont venus du côté de Kennedy (ndlr, un sous-quartier d’Abobo). Ils ont traversé la voie qui passe devant la CIE, sans agresser personne. Mais dès qu’ils ont entamé la route qui longe la mairie vers le centre culturel, on les a vus sortir leurs machettes et leurs couteaux dissimulés sous leurs vêtements», fait savoir Akandia Hamed qui indique avoir tout suivi. Selon le commerçant qui vend au bord de cette route, même les passagers des gbaka (ndlr, véhicule de transport en commun) n’ont pas été épargnés. L’un des agresseurs, dit-il, un téméraire, a passé sa main par la fenêtre d’un gbaka et arraché le sac d’une dame assise devant. Le chauffeur a voulu lutter, poursuit Hamed, mais sous la menace d’une machette bien acérée, notre brave homme renonce et regarde le scélérat partir avec son butin.

Des chauffeurs achètent des machettes

Environ une trentaine de personnes se feront dépouiller de leurs téléphones, sac à main, argent, etc. La bande de fripouilles poursuit son chemin vers le Lycée moderne d’Abobo tout en faisant des victimes sur son passage. La circulation sera paralysée pendant un moment. La bonne nouvelle dans tout ceci, pour Siaka Cissoko c’est qu’il n’y a pas eu de blessé. Ce que ce transporteur n’a pas compris cependant, c’est l’inaction de l’équipe de deux policiers armés de kalachnikovs qui était postés devant le magasin « Malobôrô », juste à l’angle de la route. « Il ont regardé ces brigands partir tranquillement sans même lever le petit doigt », s’indigne-t-il. Tous sont unanimes sur un point : c’est bien la première fois que les « microbes » osent frapper en pleine journée dans ce secteur. D’habitude, indiquent les témoins, c’est la nuit qu’on les voie débarquer avec leur dégaine de despérado, mal fringués, les yeux rougis par le haschich et les machettes à la main. « La nuit du destin, plusieurs personnes ont été attaquées ici même. Il faut dire que depuis quelques temps, les attaques sont fréquentes. C’est la fête de ramadan qu’ils préparent», frisson Bakalé.  A Samaké (sous-quartier d’Abobo), la population affirme être la cible de prédilection de ces requins. « Ce ne sont pas des adolescents. Ceux que nous voyons nous attaquer ont en moyenne la vingtaine. Ils se planquent juste pour attendre. Quand les véhicules ralentissent au niveau des trous qui parsèment la voie, on les voit surgir pour agresser les chauffeurs, prendre leurs recettes », en témoigne Roger G., un tapissier qui vit dans le quartier. La terreur de ces voleurs est telle que les chauffeurs de gbaka ont décidé de se munir de machette eux-aussi pour se défendre. Mais ils se demandent ce que fait la police pour les sortir de ce cauchemar.


Les microbes n’existent pas


Au 14ème arrondissement, on est conscient du phénomène. L’officier qui nous reçoit ce jeudi, sous le sceau de l’anonymat, se désole que la population jette la faute sur la police avec autant de facilité. « Qu’est-ce que nous n’avons pas fait pour éviter ce phénomène ? Nous avons sensibilisé, organisé des rencontres avec les parents. Nous leurs avons dit de nous signaler tous les cas suspects parce que ce sont leurs propres enfants qui commettent ces actes. Hélas, nous n’avons reçu ni plainte ni signalement »,  explique-t-il. Le problème avec ces agressions, pour l’officier, c’est qu’elles se passent très vite. Le temps qu’ils arrivent sur les lieux, les bandits disparaissent dans les ruelles insalubres et dédaléennes des quartiers. Quand bien même ils parviennent souvent à intervenir à temps, c’est assez difficile de leur mettre le grappin dessus. « On ne peut pas tirer sur une personne qui tient un couteau, même si elle vient de commettre un meurtre. Juridiquement, cela ne se fait pas », soupire notre interlocuteur. Donc, il faut leur courir après. Et comme ce sont des petits rusés, difficile de les attraper. « Les microbes n’existent pas, selon la définition qu’on donne à ces personnes. Parce que ceux qui agressent sont âgés », signale le policier. Alors, il n’y a qu’une solution à ce phénomène, selon lui : Les populations doivent collaborer avec la police. En attendant que ce jour hypothétique arrive, Abobo se prépare à d’autres assauts des « microbes » qui, apparemment, n’ont pas encore rempli la besace pour le ramadan.
Raphaël Tanoh
Leg : La gare d’Abobo, après le passage des microbes.  




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