CES QUARTIERS CHICS D'ABIDJAN DANS L'EAU!







A la Riviera 2, pour savoir qui est mieux logé, il faut attendre la saison des pluies. Quand cette période arrive, plusieurs résidents de ce quartier huppé partagent la même angoisse que les populations des quartiers précaires : les inondations. Comme ce lundi matin, par exemple. Tous ceux qui habitent derrière la demeure de la méga star du reggae, Alpha Blondy, sont pris en otage par une espèce de rivière rougeâtre qui part de la Riviera Bonoumin et qui est censée continuer jusqu’à la Riviera Golf. Problème : l’eau a débordé le système d’assainissement dépassé, lui, par les évènements. 

La clôture d'Alpha Blondy 

Cela fait maintenant plus de 8h que la pluie a cessé. Mais impossible pour les habitants de sortir de leurs cours carrelets ou pavées. Malgré la destruction de la clôture de M. Blondy, ajouté à l’élargissement de l’emprise qui s’y trouve, la force de l’eau a envahi, tel un torrent, la ruelle qui longe ces magnifiques maisons. Les sacs remplis de sable et entreposés aux différentes entrées n’ont pas suffi à arrêter l’impétueux ruissèlement. « Toute cette eau est le fruit de la pluie de 5h du matin. Il est midi, mais l’eau continue de bloquer les gens chez eux. Demandez-vous comment nous souffrons ici», déplore Etienne Théodore, l’un des résidents du quartier dont la maison a été épargnée.  En fait, pour empêcher son salon d’être inondé comme chaque année, ce salarié a eu une idée géniale: élever des marches devant l’entrée. Mais la barrière montre déjà ses limites. « Avec les dernières pluies, l’eau atteint la dernière marche », grince-t-il. 

Pelleteuses
A n’importe quel moment, son salon peut se transformer en une piscine. Pour ces familles, le mois de juin est celui de tous les cauchemars. Quand on dort, c’est la crainte de se réveiller dans l’eau. Et lorsqu’on est éveillé, il faut constamment surveiller le ciel.  « On a cru qu’avec la démolition de la clôture d’Alpha Blondy qui obstruait la coulée d'eau, les choses iraient mieux, mais non. C’est seulement en mai que la société Franzetti a débuté les travaux de canalisation ici. Le problème, c’est que ces canalisations se remplissent de sable et l’eau déborde», se lamente-t-il. Sous son regard, les énormes pelleteuses de la société Franzetti chargée d’assainir le quartier, sont elles aussi immobilisés par l’eau. Les ouvriers, coiffés de leurs casques jaunes, les chasubles tachetés de boue, se baladent où devisent sous les hangars. Impossible pour eux de reprendre le travail parce que l’énorme masse d’eau a non seulement bloqué les résidents chez eux, mais inonde également une partie de la voie qui traverse le quartier où sont également stationnés les machines. 


« Plusieurs habitants ici ont déménagé », ajoute Etienne Théodore, meurtri. Ceux qui sont encore là nourrissent une vive aversion à l’égard de la pluie. Dans cette commune, l’une des choses les mieux partagées, est le piteux état du système de canalisation.  A la Riviera Palmerais, « après barrage », l’eau a fini par chasser des propriétaires de leurs maisons. De luxueuses demeures réduites en ruines, parce qu’érigées dans des zones inondables où aucun gouvernement  n’a intérêt à investir dans un quelconque projet d’assainissement. Bonoumin, en revanche, a attiré l’attention de l’Office national de l’assainissement et du drainage (Onad). Menacé par un pernicieux bassin d’orage, les résidents assistent chaque année à une crue d’eau qui envahit leurs splendides duplex et fouette leur fierté. L’Onad prévoit des travaux sur les lieux pour mettre fin au calvaire.  


Dans le quartier du Mahou (à Cocody), le mal vient d’ailleurs : les caniveaux bouchés. Tous les magasins et domiciles situés en bordure de route  au niveau du « carrefour Mahou » jusqu’aux environs du Boulevard Latrille, se retrouvent pris d’assaut par l’eau en cas de forte pluie. « Lorsqu’il pleut, je suis obligé de poser mes appareils sur le comptoir parce que l’eau entre dans le magasin et peut même atteindre mes hanches », témoigne le gérant du Pressing Sainte-Anne. Les soirs, en rentrant chez eux, ce trentenaire croise les doigts. « Quand il se met à pleuvoir, je reviens du travail en courant pour protéger les machines», fait-il savoir. Mobarack, le vendeur de chaussures qui se trouve sur le même bâtiment,  a déjà perdu des dizaines de marchandises. « L’eau arrive avec une telle force que la boutique se remplit en quelques minutes. Plusieurs fois j’ai été obligé de jeter des chaussures parce qu’elles étaient abîmées », pleure le garçon. C’est son chiffre d’affaire qui en pâtit. 

Mahou 
En face d’eux, de l’autre côté de la route, les résidents des magnifiques villas clôturées du Mahou, sont constamment importunés pendant tout le mois de juin. Ceux de la villa 272 affirment qu’il faut se préparer à passer la serpillère au salon, à chaque fois. L’eau de ruissèlement, faute de canalisation digne de ce nom, passe sous la clôture, envahit la cour avant de se retrouver dans la maison. Les voisins ne sont pas mieux lotis.

Yopougon 
Le quartier Maca-extension dans la zone industrielle de Yopougon, lui, subit un traitement de choc à la moindre averse. Ici, c’est toute la zone qui se retrouve sous l’eau. Contiguës à la cité de la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (Maca), les habitations sont abandonnées par leurs occupants qui n’ont pas véritablement le choix. Certaines maisons sont si inondées que l’eau arrive jusqu’au toit. En cause : l’emprise de l’eau bouchée par les mauvaises habitudes. Les habitants de ce quartier ont manifesté l’année dernière en accusant les usines installées sur la voie de passage de l’eau. Mais rien n’a bougé depuis. De sorte qu’aujourd’hui, beaucoup s’en remettent au bon Dieu.

NB: Article écrit en 2015

Raphaël Tanoh

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