immeubles, ATTENTION AUX DALLES DEFECTUEUSES!!!
Suite aux nombreux écroulements d’immeubles qui ébranlent la quiétude
des Abidjanais, la semaine dernière, c’est une dalle qui s’est effondrée dans
la capitale économique ivoirienne.
Adjamé, il est un peu
plus de 11h30, ce lundi. Dans le fourmillement des rues, personne ne veut rater
l’arrivée du chef de l’Etat pour l’inauguration d’un hôpital général. Pendant
que certains jouent des coudes, un groupe de jeunes trouve mieux à faire:
monter sur la dalle d’un immeuble. Mal leur en a pris. Ils ne verront pas
l’arrivée du président de la République. Car, sous le poids de ces occupants, la
dalle de l’édifice cède. Bilan : une centaine de blessés. Les premières
explications sont déconcertantes. La dalle n’aurait pas supporté le poids des
badauds. Le bloc bétonné était-il
défectueux ou pas ? Une question qui reste sur toutes les lèvres. Comment
cela a-t-il pu se produire ? « Ce n’est pas un aspect sur
lequel les gens insistent dans la construction des immeubles. L’étanchéité est
mal faite en général. De sorte que l’eau s’infiltre et vous pouvez même voir
des traces de moisissures sur le plafond, quand il pleut », explique Fulgence
D., un habitant des Deux-Plateaux, dans la commune de Cocody, qui loge dans un duplex présentant ces
caractéristiques. Sa crainte, c’est qu’un jour, l’ouvrage s’effondre sous le
poids d’une charge. Surtout que certains ont l’habitude d’acheminer d’y envoyer
des meubles pour les sécher. Quand il fait chaud, ajoute-t-il, la famille y
déménage souvent pour contempler les étoiles. Des appréhensions, il en a au
sujet de cette dalle tellement scotchée avec des isolants qu’elle ressemble à
une ruine. « Si vous êtes incapables de faire des dalles solides, mettez
des tuiles. Comme ça, personne ne prendra
le risque de monter dessus », propose Alain Kouadio, un homme d’affaire
qui loue un immeuble au Plateau-Dokui. Il loge au deuxième, dans un bâtiment de
quatre étages. « Lorsqu’une bille tombe sur le sol du voisin qui se trouve
au-dessus de nous, j’entends le bruit comme s’il venait de la maison. C’est
clair : les dalles sont faibles. Plus grave, la grande dalle au-dessus du
bâtiment retient l’eau», frissonne-t-il.
Défaut d’étanchéité
Depuis que les
immeubles ont commencé à s’écrouler à Abidjan, Kouadio ne ferme plus l’œil. Aujourd’hui,
ils sont nombreux comme lui, à redouter le syndrome d’Adjamé. Car, derrière
cette vague d’effondrements, la réalité semble tout autre. Ce ne sont pas
uniquement les soubassements des immeubles qui sont en cause dans ces drames, mais
toute la structure des bâtiments. « L’incident d’Adjamé n’est qu’un
signal. Cela aurait pu se produire sur n’importe quel immeuble. Parce que peu
sont ceux qui respectent les normes », interpelle un entrepreneur, sous
l’anonymat. Et quelles sont ces normes ? L’Union internationale des
architectes, au sujet des normes internationales, recommande, pour la
construction, 150kg/m2 de résistance pour une dalle de béton. Selon les
experts, la surcharge d'exploitation réglementaire prise en compte dans les
calculs de structure de logements est de 150da/m2. Soit environ 150 kg/m2,
uniformément répartis. L'influence de la surcharge étant fonction du poids
propre du plancher.
Ce que disent les normes
Outre la surcharge
d'exploitation, le plancher doit supporter son propre poids. Une dalle de béton
armé de 20 cm d'épaisseur, pèse 500 kg/m2. Si elle supporte une surcharge
uniforme de 150 kg/m2, elle sera calculée sous une charge totale de 650 kg/m2,
affichent les normes internationales de construction. Pour que les matériaux
atteignent leur limite élastique, il faudrait que la charge totale atteigne 975
kg/m2, donc que la surcharge soit de 475 kg/m2. Cela implique donc l’usage de matériaux de qualité. Evidemment,
toute structure dont la poids est au-dessus de cette norme, constitue un
risque. Dans les faits, la dalle s’écroule lorsqu’elle subit une surcharge, même
en-dessous des 650kg/m2. Certes, le côté parcimonieux de certains constructeurs
est à noter dans ces pratiques, lorsque que le souci d’économiser du ciment
prime sur la sécurité, par exemple. Mais il ne faut pas non plus oublier la
mauvaise qualité du matériau. Dans une interview accordée au Patriote, en
février 2014, Dr Amédé K. Kouakou, directeur
général du Laboratoire du bâtiment et des
travaux publics (Lbtp), insistait sur cet
aspect bien souvent occulté dans la prise de mesures. « Il faut
s'assurer que les matériaux qu'on utilise pour la construction sont de bonne
qualité. Aujourd'hui, la Côte d'Ivoire est un marché très ouvert. Et
malheureusement, il arrive qu'on trouve des matériaux qui sont de mauvaise
qualité. Comme des fers à béton, du ciment, des graviers... On vous dira que
pour telle construction, le béton doit avoir une résistance de 25 méga pascals.
Si vous prenez du béton de mauvaise qualité qui ne permet pas d'avoir les 25
méga pascals nécessaires à l'ouvrage et que vous n'en avez que 5, il est
évident que cela ne peut supporter le bâtiment. Donc, il y a risque
d'écroulement», expliquait Dr Amédé. Or, la construction des dalles inclue
essentiellement les fers à béton, le gravier et le ciment. Après l’écroulement
du cinquième immeuble à Abidjan cette année, le ministre de la Construction, du
logement, de l’assainissement et de l’urbanisme, Mamadou Sanogo, prévenait en
ces termes : « Les premiers incidents ou accidents nous ont emmenés déjà à
proposer la prise d’un décret pour obliger tous les constructeurs à s’adresser
à un bureau d’étude, avant les travaux de construction. Il faut
respecter les directives du ministère de la Construction ». Ces mesures sont basées sur les contrôles. Des contrôles des chantiers en cours mais également des immeubles qui ont
été bâtis et qui ne respectent pas les normes. Selon une source au ministère de
la Construction, aujourd’hui, il est plus question d’aider le ministre à mener la
sensibilisation au sein des populations.
Raphaël Tanoh
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