Amon Perpétue (directrice régionale du #travail#, Abidjan-lagune) : « Le férié peut entrainer une diminution de salaire »

Le fait que le #férié# de la nuit du destin tombe un dimanche, et la probable coïncidence  de la #fête nationale# et l’Aïd-el-fitr laissent confus beaucoup de travailleurs. Nous avons interrogé la directrice régionale du travail, Abidjan-lagune qui clarifie la question des jours fériés.

    

A quel moment une journée est-elle déclarée chômée et payée ?

Sachez d’abord qu’il y a le code du travail et la convention collective. Dans le code du travail, il n’y a que deux jours chômés-payés : le 1^er mai et le 7 août. Même si ces jours tombent un dimanche, ils sont  non seulement fériés, mais aussi chômés-payés.   Beaucoup de chefs d’entreprises viennent nous voir à cause de toutes ces confusions.

Qu’est-ce que cela signifie-t-il concrètement ?

Cela veut dire que si c’est un dimanche, le lendemain lundi est férié, tout court. A part ces deux jours, les autres jours fériés sont fériés tout court. Ils ne sont pas journées chômées-payées. Il y a donc une nuance entre un jour férié simplement et un jour férié chômé-payé.

Quelle est cette nuance ?

Le férié chômé et payé signifie, comme le terme l’indique, que la journée est payée pour tout le monde. Que vous soyez payés au mois ou payé à l’heure de travail. Mais lorsque c’est une journée chômée tout court, il y a une différence. Pour celui qui perçoit son salaire par mois, rien ne change. Il reçoit sa paye ordinaire. On ne déduit pas cette journée du salaire. Mais pour ceux qui sont payés à l’heure, le code indique que cette journée où vous n’avez pas travaillé est déduite de votre salaire.

Donc la nuance se situe au niveau de ceux qui sont payés à l’heure.

Exact. Qu’un jour soit journée chômé-payé ou chômé tout court, celui qui prend son salaire par mois, n’a pas de problème. Mais pour celui qui est payé à l’heure, l’employeur peut demander à récupérer les heures pour ceux qui ne sont pas venus travailler. Donc, pour récapituler, dans le code du travail, seul le 1^er mai et le jour de l’indépendance sont journées chômées-payées, les autres jours fériés sont simplement chômés.

La question du dimanche est donc claire : seule le 1^er mai et le 7 août peuvent entrainer un lundi férié s’ils tombent un dimanche ?

Exact. Les autres jours fériés n’ont aucune incidence sur le lundi si le dimanche est férié.

Que dit la convention collective ?

Tout d’abord, il faut savoir que la convention collective ne s’applique pas à tout le monde. Seuls ceux qui sont signataires, sont concernés. Le secteur agricole par exemple n’est pas signataire de la convention qui date de 1977. Tous ceux qui est venu après n’en faisaient pas partie. Mais certains ont commencé à s’intégrer dans la convention collective. Je crois que c’est le secteur agricole qui est formellement hors de cette convention. Maintenant, dans la convention collective, à part le 1^er mai et l’indépendance, les autres jours sont journées chômées-payées : tabaski, ramadan, pâques, assomption, etc. Dans les communiqués relatifs aux jours fériés, on précise que ces jours sont journées chômées-payées pour ceux qui sont signataires de la convention collective. Donc, il faut comprendre ceci : si on prend deux salariés payés à l’heure, l’un qui est signataire de la convention collective, et l’autre qui ne l’est pas. Les autres jours fériés sont chômés-payés pour celui qui est signataire de la convention collective, mais pas pour celui qui ne l’a pas signé. Mais il y a une exception, le lundi de pâques et la pentecôte. Ces deux jours restent partout férié.

Pourquoi le lundi de pâques et la pentecôte ne sont-ils pas  chômés-payés dans la convention collective ?

Il faut savoir que la convention résulte d’accord entre trois parties : Employeurs, travailleurs, Etat. Lors de la signature de cette convention, il y a eu des négociations. Sûrement, vu le nombre considérable de fériés dans l’année, les employeurs ont sans doute décidé de ne pas intégrer ces deux jours comme chômé-payé.

Combien de jours fériés existe-t-il ?

Dans le code du travail, il en y a 13 : le 1^er janvier, le lundi de pâques, le jour de l’ascension, le lundi de pentecôte, le ramadan, la tabaski, l’assomption, la toussaint, la journée de la paix, la noël, le lendemain de la nuit du destin, le lendemain de l’anniversaire du prophète Mohamed, la fête nationale  et le 1^er mai.  Il y a avait la fête du décès de Félix Houphouet-Boigny, mais depuis 2000, cette journée n’est pas fériée. Maintenant, seule la fête de l’indépendance et le 1^er mai sont des journées chômées-payées.

Qu’en est-il de la convention collective ?

Il y a seulement 9 jours fériés. Le lendemain de la nuit du destin, l’anniversaire du prophète Mohamed, le lundi de pentecôte, le lundi de pâques, la journée de la paix ne sont pas pris en compte par la convention. 

Il arrive parfois que le président de la République décide à la suite d’évènement que des jours soient fériés…

Le président n’est pas obligé de passer par la loi. Il peut prendre un décret. Si par exemple, les éléphants ont remporté la coupe d’Afrique, il peut décider de faire férié le lendemain de leur victoire. Ou même férié chômé et payé.

Justement, cela n’a-t-il pas d’incidence au niveau des entreprises ? Qui paye par exemple, la journée de travail des personnes payées à l’heure ?

L’employeur.

Le chef d’entreprise subit alors…

Si vous le voulez. Il est obligé de se plier à la loi. Mais si le président précise que c’est une journée férié tout court, alors pour les travailleurs qui sont payés à l’heure, l’employeur n’est pas obligé de payer cette journée.

Est-ce que le fait qu’il y ait assez de jours fériés dans une année a une influence sur l’économie du pays ?

Il faut savoir une chose. Si la loi a prévu les jours fériés dans ses dispositions, comprenez que les contours de la question ont été étudiés, et cela ne peut avoir d’incidence sur le fonctionnement du pays. Seuls les jours fériés décidés par décret ou par ordonnance peuvent peut-être créer des problèmes, parce qu’ils n’étaient pas prévus. 

Chaque pays a ses jours fériés. En Côte d’Ivoire, certains auraient souhaité par exemple que la journée nationale de la paix soit un jour férié. Que faut-il pour qu’une journée soit déclarée fériée ?

C’est par le biais de la loi. C'est-à-dire qu’il y a eu des propositions et que la question est passée au conseil des ministres, au préalable et ensuite devant l’assemblée nationale. Ce n’est que lorsque l’assemblée vote le projet que cela devient une loi. Hors mis cela, tout les autres sont des décrets, des ordonnances, des arrêtés, mais s’appliquent comme une loi.

Interview réalisée par Raphaël Tanoh

Légende : Selon Mme Amon, le chef de l’Etat est libre de décréter un jour férié.