PORTRAIT/ PR TIONA OUATTARA, L'HISTORIEN DES SENOUFOS








On le dit incontournable dans son domaine, lui se proclame plutôt historien des Sénoufos. Le professeur Tiona Ouattara est un chercheur passionné et travailleur dont le parcours doit faire école.


 Humble, réservé, progressiste et combattif comme son idole, le mythique Laurent Pokou, Pr Tiona Ouattara a presque tout gagné dans sa carrière. Il jouit du grade académique de professeur titulaire. En outre, l’universitaire occupe à ce jour la fonction de directeur de la recherche au département d’histoire, à l’université Félix Houphouet-Boigny. Après avoir marqué le domaine de la recherche, ce Sénoufo né à Siénékaha (20 km de Korhogo), il y a 63 ans, s’est illustré en 2002 avec un premier prix sur la recherche. Ainsi, personne - pas même lui - ne semblait surpris, lorsque le 18 janvier denier, on lui décernait le prix de la recherche scientifique 2012.

Des révélations sur le peuple sénoufo
Son livre, « Sur les rives du haut Bagoé en Côte d’Ivoire : Histoire de Boundiali de la fondation à 1951 », a une fois de plus montré le talent du chercheur inlassable. 


Pourtant, l’historien n’était pas prédestiné à ce métier. En fait, il aurait pu être médecin. Comme il l’explique, la sève de la médecine lui coulait dans les veines lorsqu’il terminait son cycle secondaire à Katiola. C’est à partir de sa licence à l’université de Cocody que l’horizon change de couleur pour l’étudiant d’alors. Il penche pour l’enseignement. Il achèvera de s’en convaincre en France, lorsqu’il passe sa maîtrise en histoire à Bordeaux puis à Paris. « Très souvent, ce qu’on fait, ce n’est pas ce qu’on aime », confie-t-il, quelques semaines après avoir enterré son géniteur à Korhogo. Mais cet époux fidèle, père de deux enfants, pense que l’avenir est certainement écrit quelque part. Car, dès qu’il revient au pays, il se voit confier, à lui fils de Sénoufo, la faveur de travailler sur l’histoire du peuple sénoufo. «Il n’y a pas d’autres historiens sur le peuple sénoufo, je suis le seul», constate-t-il avec un certain émerveillement. C’est à croire que si Tiona Ouattara ne s’était pas décidé, il n’y aurait peut-être pas de recherches historiques fouillées et élaborées à ce jour sur ce peuple que l’historien caractérise volontiers comme grand, fort et porté sur l’agriculture. 


Lors de ses travaux qui lui ont valu le prix de la recherche scientifique, le natif de Siénékaha a fait des découvertes stupéfiantes sur ses frères du Nord. Contrairement aux thèses qui stipulent que le Sénoufo est de nature pacifique, le directeur de la recherche a plutôt vu un peuple guerrier. « Le Sénoufo, c’est une bête fauve. Ils ont aidé, par exemple, Samory Touré à combattre leurs propres frères. Quand il n’est pas dans le cadre du village, c'est-à-dire dans le cadre du Poro, le Sénoufo devient un animal». Cette remarque est peut-être un pavé dans la marre.

Auteur enseigné aux USA
Mais tous ceux qui connaissent ce fan d’Ernesto Djédjé, d’Amédé Pierre et de Lougah François, savent qu’il sait également rechercher l’inspiration dans l’esthétique de ces artistes néo-oralistes ivoiriens pour nourrir ses travaux scientifiques. C’est dire que l’homme est multidimensionnel. Son dernier livre est enseigné aux Etats-Unis. « Tionos », comme on l’appelait au lycée, aimerait que ses travaux soient davantage connus et divulgués. Tout en fustigeant le peu d’intérêt que les autorités ivoiriennes portent au financement de la recherche, il souhaite que le résultat des travaux ne périsse pas dans les tiroirs. 


En outre, il plaide sans relâche pour la promotion des travaux produits par les enseignants-chercheurs ivoiriens qui planent sur le Conseil africain et malgache pour l’enseignement supérieur (Cames). Ayant placé sa confiance dans le « départ nouveau », il attend observer avec son esprit critique le changement qui s’opère peu à peu au sein des universités publiques. Il est loisible de comprendre pourquoi ce chercheur de confession catholique appelle de tous ces vœux cette Côte d’Ivoire où les travaux des chercheurs qui trouvent ne sont pas abandonnés dans les tiroirs de l’oubli.

Article réalisé en février 2013

Raphaël Tanoh
Leg : Le dernier livre du professeur Tiona Ouattara, « Tionos » est enseigné aux Usa

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